Pont en acier novateur aux lignes élancées
Construction en acier
Le nouveau pont sur le Neckar est à la fois une porte d’entrée emblématique dans Stuttgart et une œuvre pionnière en matière d’ingénierie. Le pont ferroviaire à quatre voies qui franchit le Neckar doit ce statut à sa conception innovante en forme de voiles en acier et à sa portée de près de 80 m. Les voiles en acier sont en tôles de Dillinger, dont l’épaisseur variable permet une adaptation optimale du profilé en tôle aux sollicitations de tension.
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Construction en acier
Pont en acier novateur aux lignes élancées
Le nouveau pont sur le Neckar est à la fois une porte d’entrée emblématique dans Stuttgart et une œuvre pionnière en matière d’ingénierie. Le pont ferroviaire à quatre voies qui franchit le Neckar doit ce statut à sa conception innovante en forme de voiles en acier et à sa portée de près de 80 m. Les voiles en acier sont en tôles de Dillinger, dont l’épaisseur variable permet une adaptation optimale du profilé en tôle aux sollicitations de tension.
Le projet du pont sur le Neckar est une idée du bureau d’ingénieurs-conseils indépendants renommé Schlaich Bergermann Partner (sbp) de Stuttgart. Fondé en 1980, il compte aujourd’hui 190 collaborateurs et les projets de ponts représentent environ 40 % de son chiffre d’affaires.
Le pont sur le Neckar se situe sur l’axe Paris-Munich-Budapest et fait partie du projet d’infrastructure Stuttgart 21, qui prévoit aussi la reconstruction de la gare centrale de Stuttgart et la réorganisation de ce nœud ferroviaire. La transformation de l’ancien terminus en une gare de passage souterraine a décalé les voies de 90°, obligeant à remplacer l’ancien pont par un nouveau destiné aux trains de banlieue et de grandes lignes. Avec ses 345 m de long et 25 m de large, le nouveau pont à quatre voies ferrées qui enjambe le Neckar présente des portées de 77 m et 74 m. Son point le plus haut s’élève à 15 m au-dessus du niveau d’eau normal du fleuve.
Des voiles d’acier à la place de câbles
Le nouveau pont sur le Neckar se compose d’une poutre continue à sept travées. Les deux travées principales qui enjambent le fleuve sont caractérisées par d’imposantes voiles d’acier. Toutes deux sont reliées à neuf mâts d’acier via les voiles d’acier et des auto-ancrages. Pour la construction composite en acier, sbp a conçu un ouvrage porteur à base de trois poutres-caissons immobiles en acier soutenues par des voiles d’acier et posées longitudinalement sur trois séries de piles situées sur les côtés extérieurs et au milieu de la superstructure. Les neufs piles élancées supportent les énormes forces de freinage horizontales appliquées sur les quatre voies du pont ferroviaire. Les ingénieurs de sbp ont voulu réaliser un pont visuellement léger et transparent malgré la portée de près de 80 m et la charge ferroviaire des quatre voies. Cela imposait un ouvrage porteur supérieur avec des brides qui descendent des mâts. Si la conception est similaire à celle d’un pont à haubans, sbp a opté pour des brides rigides en tôles d’acier, réinterprétant ainsi le modèle d’un pont suspendu auto-ancré classique.
Les paquets de deux tôles sur chant reliées par des joints en bout périphériques forment les brides et les sommets des mâts de toutes les voiles. Les brides intégrées dans les voiles par sbp inversent le principe d’un ouvrage porteur arqué. Philipp Wenger, Technical Director chez sbp, explique l’idée de base : « Sur un pont en arc, les forces verticales de la superstructure sont dissipées en forces de compression par les arcs. Si l’on inverse ce principe, les arcs deviennent des brides sollicitées exclusivement en traction. » Il ajoute : « Pour cet arc inversé, nous avons opté pour une section assez fine en bas et légèrement élargie telle une trompette, qui devient plus étroite vers le haut tout en gagnant en épaisseur. » Cette interaction sophistiquée entre surface et volume a permis, grâce à l’épaisseur variable des tôles d’acier, une exploitation identique de la tension dans l’ensemble de la voile et sur toute sa longueur. En tout, 18 demi-voiles de forme identique ont été soudées pour former les 9 voiles caractéristiques du pont. Elles dissipent essentiellement les forces comme des membranes et ont été fabriquées à partir d’épaisseurs de tôle qui varient à leur surface.
« Sur un pont en arc, les forces verticales de la superstructure sont dissipées en forces de compression par les arcs. Si l’on inverse ce principe, les arcs deviennent des brides sollicitées exclusivement en traction. »
Du sur-mesure en tôles minutieusement choisies
Chaque bride des deux supports extérieurs se compose d’un paquet de deux tôles PL cunéiformes soudées dont l’épaisseur passe de 35 à 90 mm. Elles sont jointes longitudinalement en éléments de 10,5 m de long et d’une épaisseur de 70 à 180 mm. Nettement plus sollicitées, les voiles intermédiaires se composent de paquets de tôles allant jusqu’à 250 mm d’épaisseur fabriquées dans les qualités d’acier à plus haute résistance S460ML et S460QL. Mais comme les tôles PL ne peuvent être livrées qu’à l’état normalisé (p. ex. S460NL), on a recouru à des tôles fraisées de manière conique dans l’épaisseur pour ces brides. Pour les brides de transfert de charges qui évoquent des voiles et dont la section s’affine progressivement vers le bas, il était logique pour sbp d’utiliser des tôles PL, dont l’épaisseur ajustable de manière variable dans le sens de la longueur pendant le processus de laminage permet une adaptation optimale du profilé en tôle aux exigences statiques, constructives et de fabrication.
Des tôles PL pour réduire les délais
Proposées par Dillinger depuis 1983 et sans cesse améliorées, les tôles PL sont présentes dans de nombreux projets de construction de ponts et de génie civil partout en Europe. Disponibles en format cunéiforme simple, double ou multiple, elles évitent une transformation mécanique chronophage et coûteuse ou le soudage de paquets de lamelles. Cela réduit non seulement la quantité de matériaux, mais aussi le poids au transport et au montage. L’économie de cordons de soudure réduit aussi le temps de fabrication et de contrôle tout en limitant les frais de soudage. Au final, elles permettent jusqu’à 10 % d’économies de coûts malgré leur production onéreuse et le prix de revient plus élevé qui en découle. La réduction du nombre de cordons de soudure et la possibilité de les poser dans des zones moins sollicitées débouchent en outre sur des assemblages sûrs et sans fatigue.
Acier innovant à la place du béton
Mais pour la construction du nouveau pont sur le Neckar, un autre aspect a plaidé pour l’utilisation des tôles fortes de Dillinger. Le pont se situe dans la zone de protection des sources minérales de Stuttgart : Bad Cannstatt représente, après Budapest, le plus important site d’eau minérale d’Europe, avec un débit de 44 millions de litres par jour. Le site du nouveau pont se situe au cœur des couches rocheuses soumises à la très forte pression de l’eau minérale artésienne. Les pressions naturelles qui y règnent ne pouvaient pas être modifiées par la construction, et ce pour éviter l’endommagement de la couche d’étanchéité et les jaillissements d’eau minérale qui pourraient en découler. Des restrictions importantes ont donc dû être respectées pour les travaux de construction et de fondation. La structure porteuse longitudinale a donc aussi dû être réalisée en acier et non, comme initialement prévu, en béton. Cela a permis de réduire le poids propre du pont de plus de 20 %, limitant considérablement les charges à transférer dans le sol.
En tout, Dillinger a livré 1600 t d’acier à Max Bögl, essentiellement des tôles d’aciers spéciaux d’épaisseurs et formats importants. 169 t ont servi aux tôles PL destinées aux brides en acier de construction de qualité S355J2+N, S355N et S355NL. Pour les poutres longitudinales et transversales, les tôles des extrémités de mâts et les parties à épaisseur variable des voiles, c’est essentiellement de l’acier à laminage thermomécanique (TM) qui a été utilisé, dont des tôles de très grand format de qualité S460ML pesant plus de 30 t. Les grands formats de ces tôles TM ont permis de réduire fortement le nombre de cordons de soudure et, en raison de leur résistance plus élevée, de limiter davantage le poids. En outre, leur faible équivalent carbone garantissait des propriétés d’usinage et une résistance excellentes, contribuant ainsi à la sécurité de la construction et à la rentabilité de la fabrication.
Sommets de mâts névralgiques
La fixation des tôles en S460QL disposées de chant et d’une épaisseur allant jusqu’à 250 mm aux plaques d’extrémité des mâts fut un défi majeur pour l’assemblage et la fabrication. Les sommets des mâts, auxquels les brides sont reliées des deux côtés, sont des points névralgiques en raison du flux de forces entre les voiles et les mâts. Les épaisseurs de tôles et l’acier de construction à grain fin et haute résistance de Dillinger utilisé ont nécessité non seulement une validation au cas par cas, mais aussi une autorisation spéciale de la Deutsche Bahn, son règlement prévoyant une épaisseur de tôle maximale de 100 mm. Ainsi, les experts de sbp ont dû démontrer la résistance à la fatigue requise pour ces cordons soumis à des contraintes élevées, entre autres au moyen d’importantes analyses de structure et de concentrations de contraintes sur des modèles de volumes finis et d’éléments finis. Pour réaliser le cordon de soudure périphérique avec joint de contact présentant au final une faible surépaisseur, les tôles de grand format ont d’abord été préchauffées à près de 500 degrés et soigneusement protégées du refroidissement pendant le processus de soudage complexe. ■
Panneau de chantier
Projet :
Pont sur le Neckar, Stuttgart (D)
Conception / planification :
Bureau d’ingénierie Schlaich Bergermann Partner, Stuttgart
Réalisation :
Entreprise de construction Max Bögl GmbH & Co. KG, Neumark (D)
Fournisseur des tôles :
AG der Dillinger Hüttenwerke, Dillingen (D)